Il pleuvait cette nuit-là une petite pluie fine, tout en murmures. Comme tous les soirs, je m’étais assise sur le rebord de la fenêtre, pour guetter l’arriver de mon papa. J’espérais toujours qu’il revienne avant que l’on me force à rejoindre mon lit. Pourquoi m’obligeait-on toujours à gagner cet endroit détestable ? Les bras de mon papa étaient mille fois plus agréables, surtout quand il me berçait doucement, en me racontant une histoire. Je scrutais l’allée, en espérant y voir se dessiner sa silhouette, mais ce soir là, la tâche était particulièrement difficile, à cause de la pluie et de l’obscurité. Je soupirais, l’heure approchait, où je devrai rejoindre mon lit et rien ne semblait indiquer que mon papounet allait arriver. C’est alors que laissant mes yeux vagabonder dans la nuit, je perçus un mouvement, une faible lueur. Je crus tout d’abord que mon imagination me jouait des tours, mais cela se reproduisit. Quelque chose bougeait, à l’orée du bois qui bordait la propriété, mais comment en être sûr, dans cette obscurité. Il fallait que je me rende compte par moi-même que je vois de mes propres yeux ce qui bougeait, probablement un animal blessé, pourtant comment expliquer cette lueur. Je devais me rendre à l’orée de la forêt, mais personne ne me laisserait sortir à cette heure et sous la pluie. Je devais trouver un stratagème pour m’y rendre sans me faire voir. C’est alors qu’une idée me vint, j’appelais Martha, c’est elle qui me garde quand papa n’est pas là. Je fis mon petit numéro de fille mourante, ça marche toujours avec elle. C’est un truc, que j’utilise toujours, lorsque je veux être seule et laisser vagabonder mon imagination pour lire où écrire. Comme je le pensais, elle me conseilla d’aller me coucher immédiatement, en disant que si demain ça n’allait pas mieux, elle appellerait le médecin. Une fois que je fus couchée, elle déposa un baiser sur mon front et me souhaita bonne nuit en refermant la porte. Ce qu’elle peut-être naïve des fois, si elle savait, ce que je prépare. J’attendis quelques instants, sans bouger dans le noir, lorsque plus aucun bruit ne me parvint, je sortis de mon lit le plus doucement possible. J’attrapais ma robe de chambre, je l’adorais, elle était d’une belle couleur mauve, mon papa l’avait choisi pour moi. Le plus important, c’est qu’elle avait une capuche, ça pouvait être utile, après l’avoir enfilée, je me suis dirigée, à pas de loup, vers la porte. Je l’entrouvris en prenant soin de tourner la poignée avec délicatesse, c’est énervant, il faut toujours que ça grince. Je guettais le moindre bruit, qui me signalerait, la présence de Martha, dans les parages, mais heureusement ce n’était pas le cas. Je finis pas m’aventurer dans le couloir en faisant bien attention de ne pas poser mes pieds nus sur les lattes de parquets qui craquent, mais il faut toujours qu’il en ai une qui vous trahisse. C’est au moment le plus silencieux qu’un craquement horrible sort du plancher. La traîtresse elle ne grince jamais normalement, je m’immobilise, je panique, dois-je fuir vers ma chambre ou continuer, mais personne ne semble avoir entendu le bruit du parquet. Je respire un grand coup, le plus dur reste à faire, l’escalier, l’ultime obstacle entre moi et la cuisine où se trouve la porte de derrière. Je m’avançais donc sur la pointe des pieds, vers la dernière épreuve. Lorsque mon pied droit se posa sur la première marche, je crus que mon cœur allait s’arrêter de battre, le son qui en sortit était encore pire que le précédent, il faut dire que la maison n’est pas toute jeune. Pourtant, il ne se passa rien et je finis par m’encourager mentalement à continuer. J’atteins enfin le bas de l’escalier maudit, je fis quelques pas vers le salon pour vérifier, si Martha était bien là. Je pus constater, qu’elle était confortablement installée devant la télé, et qu’elle ne faisait aucunement attention, à tous les bruits environnants. J’entrepris un demi tour lent et silencieux pour rejoindre la cuisine. Je franchis la porte de derrière avec beaucoup d’appréhension, car la clé grinça et je ne pus qu’attendre en silence que Martha me tombe dessus en hurlant, mais cela ne se produisit pas. Je finis par me retrouver dans le jardin, la pelouse humide sur mes pieds nus me fit frissonner. Je me coiffais avec la capuche de ma robe de chambre et courus vers l’orée du bois, vers cette lueur que j’avais vue de la fenêtre et qui semblait s’affaiblir. C’est là, que je l’ai vu, elle brillait légèrement dans la nuit. Elle était recroquevillée et grelottait, ses ailes étaient trempées. Ce n’était pas un animal blessé que j’avais sous les yeux, mais une fée vêtue d’une jolie robe mauve et portant une clé dorée autour du cou. Elle semblait bien mal en point, je la pris dans mes mains, le plus délicatement possible et je repartis en courant vers la maison. Je refis le chemin dans le sens inverse en m’assurant au passage que Martha n’avait pas bougé. Lorsque je revins dans ma chambre, je la déposais dans le lit d’une de mes poupées, elle ouvrit les yeux et me sourit, j’en fis de même et elle se rendormit. C’est étrange, mais soudain je me suis sentie tellement fatiguée, mes paupières semblaient si lourdes, j’ai à peine eue la force de rejoindre mon lit, je suis tombée de sommeil. Je me suis souvent demandée, si cette nuit n’avait pas été qu’un simple rêve. Pourtant, le matin à mon réveil, même si la fée n’était plus là, dans le lit où elle avait dormi, une chose brillait, elle avait laissé derrière elle, la clé dorée qu’elle portait autour du cou.